PETIT PAYS de Gaël Faye


17/20




Edition: Grasset (ebook - 2016)

Origine de l'auteur: Burundi (Franco-rwandais)

Genre: Autobiographie, Drame, Guerre, Histoire

Nombre de pages: 175











En 1992, Gabriel, dix ans, vit au Burundi avec son père français, entrepreneur, sa mère rwandaise et sa petite soeur Ana, dans confortable quartier d'expatriés. Gabriel passe le plus clair de son temps avec ses copains, une joyeuse bande occupées à faire les quatre cents coups. Un quotidien paisible, une enfance douce qui vont se disloquer en même temps que ce "petit pays" d'Afrique brutalement malmené par l'Histoire. Gabriel voit avec inquiétude ses parents se séparer, puis la guerre civile se profiler, suivie du drame rwandais. Le quartier est bouleversé. Par vagues successives, la violence l'envahit, l'imprègne, et tout bascule. Gabriel se croyait un enfant, il va se découvrir métis, tutsi, français...




"Sous les draps, j'ai commencé à lire le roman, l'histoire d'un vieux pêcheur, d'un petit garçon, d'un gros poisson, d'une bande de requins... Au fil de la lecture, mon lit se transformait en bateau, j'entendais le clapotis des vagues taper contre le bord du matelas, je sentais l'air du large et le vent pousser la voile de mes draps."

Grâce à la plume de Gaël Faye, j'ai voyagé durant les 175 pages de ce court mais intense roman.
Au fil de ma lecture, mon divan se transformait en une ombre accueillante sous un manguier. J'étais avec Gaby et je sentais la texture des chemins de terre sous mes pieds nus. J'ai partagé la joie (et les petits accros) des moments passé avec une bande d'amis, découvert le gôut exquis du jus de mangue couler dans ma bouche, déborder sur mon menton, ...
J'ai aussi découvert ce sentiment jusqu'alors inconnu qui fait sourire et devenir tout rouge devant des mots écrits par une correspondante inconnue. J'ai senti le plaisirs et la liberté que cela procure de se baigner nu dans la Muha. J'ai vécu le magnifique et insouciant quotidien d'un enfant au Burundi.

Mais de fait, j'ai aussi ressenti la peur et l'angoisse. Celles qui grandissent quand on finit par comprendre ce qu'il se passe réellement au-delà de l'impasse du quartier. Ce quartier dans lequel on est si bien, dans lequel on est tant en sécurité. Dans lequel on est les maîtres.
J'ai ressenti l'horreur de la guerre, que l'on se fait juste parce que l'on est différent. Parce qu'on n'a pas le même nez...
J'ai ressentir cette insécurité grandissante, qui se fait une place tellement grande qu'elle en devient une sensation aussi banale que la faim et la soif. Tout comme pour Gabriel, ce livre m'a fait passer par tout un tas d'émotions.

C'est un livre vraiment bien écrit et prenant. J'ai beaucoup aimé les mots choisis par l'auteur pour raconter son histoire. On sent qu'il y a du vécu, du vrai, de l'authentique dans ses paroles. C'est beau, innocent et cruel à la fois. 
Les derniers paragraphes m'ont beaucoup touchés. J'ai fermé le livre avec une petite boule au ventre, regrettant que cela soit déjà fini, la plume de Gaël Faye va me manquer.

C'est un livre à découvrir sans hésiter !


"J'ai les yeux marrons donc je ne vois les autres qu'en marron. Ma mère, mon père, ma soeur, Prothé, Donatien, Innocent, les copains... ils sont tous lait au café. Chacun voit le monde à travers la couleur de ses yeux."



"Chaque jour, la liste des morts s'allongeait, le Rwanda était devenu un immense terrain de chasse dans lequel le Tusti était le gibier. Un humain coupable d'être né, coupable d'être. Une vermine aux yeux des tueurs, un cancrelat qu'il fallait écraser."


"Le génocide est une marrée noire, ceux qui ne s'y sont pas noyés sont mazoutés à vie."

" Je n'avais pas de réponse à donner à ma petite soeur. Je n'avais pas d'explication sur la mort des uns et la haine des autres. La guerre, c'était peut-être ça, ne rien comprendre."


"Je me disais que son chagrin était plus fort que sa raison. La souffrance est un joker dans le jeu de la discussion, elle couche tous les autres arguments sur son passage. En un sens, elle est injuste."



Ce que j'ai préféré:
° L'écriture, vraiment belle
° Le thème abordé
° La pudeur avec laquelle ce drame est raconté, l'auteur n'est pas là pour accuser qui que ce soit. Il raconte simplement la vie des gens à Bujumbura au moment des faits.

Ce que j'ai moins aimé:
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Commentaires

  1. Un des meilleurs romans de littérature contemporaine que j'ai pu lire (avec aussi Reparer les vivants), content qu'il t'ai plus

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  2. Pareil concernant le contemporain. J'y suis parfois assez frileuse. On peut dire qu'il m'a bien renoué avec le genre. Réparer les vivants j'en ai entendu énormément de bien oui.

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